2022-11-14

 REGARDANT LE PASSAGE DE LA PROCESSION


 


 


C'était le jeudi saint et il neigeait à Ségovie. La cagoule est un peu aveugle et il y a un tissu qui recouvre le globe oculaire. Le pénitent doit savoir où il va. D'où ce regard des capotes de Pâques qui me faisait peur depuis toute petite et qui pouvait être aussi intimidant que les drones du Carnaval. Euh, euh, je t'ai fait peur. oh ! La noix de coco. Puis cette capote ridicule qui n'était rien d'autre que la vieille délicatesse de l'âme collective d'un peuple qui tremblait devant l'Inquisition et devait faire une démonstration publique et une profession de foi dans ma Ségovie, et que là-bas nous avons toujours été de vieux chrétiens. Aussi, ceux qui étaient détendus au bras séculier du Saint-Office étaient vêtus d'une tunique violette, leurs visages étaient couverts et ils étaient mis sur un âne.


Au bûcher on allait toujours à reculons. Les processions sont un souvenir énigmatique de ce monde hétéroclite. Le catholicisme avait triomphé. Presque personne n'explique comment de telles représentations de la ferveur populaire survivent. Pendant quelques heures, ces masses ferventes ont arraché Dieu des mains des prêtres et l'ont emmené dans les rues sous des bannières. C'était aussi un monde de guilde. Villes divisées en quartiers. A l'horizon les confréries. Les confréries s'affrontaient comme dans un championnat de mus pour exhiber le meilleur Christ et l'image la plus vivante de la Vierge. Nous étions de Dolores de Santa Eulalia, d'un autre nom Notre-Dame des Sept Couteaux. Anciennement secteur textile, principalement des teinturiers et des poires.


Dans les rues de ma ville cette nuit neigeuse (c'était l'action de l'exhidra ou des vents favoniens qui, pour les Romains, annonçant la pluie, apportait le printemps) je portais ma croix et marchais pieds nus et avec des chaînes sur le sol gelé. Sous le capot, les prophètes du saint Prophète ont sonné à mes oreilles avec détermination: «J'ai donné mon corps à ceux qui m'ont fait du mal et mes joues à ceux qui m'ont tiré les cheveux: je n'ai pas détourné mon visage de ceux qui m'ont insulté et craché sur moi. Le Seigneur m'a aidé » [Isaïe 50,5,10]. Toute ma vie j'ai connu ce que c'est que la calomnie et le gouffre des bouches purulentes, mais j'avais les reins bien liés. Sint lumbi vestri precinti (il faut attacher les mâles) autres mots dont je me souvenais quand je me ceignais de la ceinture ou de la corde en sparte cofrade Pas de risque pour ma santé malgré cette absurdité de marcher pieds nus et avec une croix qui pesait cent vingt kilos à la côte Vous ne vous sentez mal que pendant quelques jours, mais ensuite comme si de rien n'était. Miracle? Je ne pourrais pas l'expliquer mais il y a quelque chose.


 Vous vous sentez coupable, vous ne savez pas pour qui et avec un complexe de culpabilité. La faute. Oh Felix blâme. Alors j'ai compris, c'étaient des gens moins friands de tauromachie que d'autos de fe. Là, ils ont toujours aimé les cortèges et les cavalcades. Pas. flotte. Le Saint-Sacrement. Le Tarasque de Corpus. Les Fêtes du Quatorzième. La piété d'Aniceto Mariñas. La neuvaine de la Fuencisla. Le coq de San Pedro. L'épine de Santa Rita de Casia. J'ai vu des géants, des grosses têtes et des arnaqueurs à travers San Juan de Junio ​​​​et même le bras incorruptible de San Antonio María Claret défiler sous les yeux solennels et égocentriques de l'aqueduc car toutes les processions de la Grande Semaine et les autres ont convergé sur la Plaza del Azoguejo .


Il n'y avait pas de cinéma, peu de théâtres et une grande envie d'apprendre et de voir. Les visages de ces sculptures grotesques et de ces Christs mourants, sanglants, blessés et avec l'expression de l'agonie, les cheveux raides, les barbes hirsutes et ces vierges tourmentées aux expressions douloureuses, dentelles de soie, justaucorps de dentelle et moqueros de dentelle, étant ainsi que les larmes étaient fait de verre, traînant beaucoup de peplum et beaucoup de bijoux sous le dais de diamants, ils ont élevé mon âme. C'étaient des sensations durables. Que j'ai marqué au plus profond de mon être.


 ▬Pourquoi libérez-vous autant de mots latins dans vos écrits, Ejusmodi ?


 ▬ Prends-le parce que ça va être parce qu'il semble que les échos de la chanson passio faite à trois voix par les chanteurs de ma cathédrale -Dimas, Jerónimo et Don Bernardino, la basse Jesus, le contralto, la synagogue et le ténor, chroniqueur)


 Et ces voix, cette mélodie, sonnent comme un cri immortel dans ma mémoire. Le champ des cortèges était d'une plastique de rigueur. Sermons sculptés dans du papier mâché ou des images en bois d'Espirdo. Une théologie qui entre par les yeux et dont tout au long de vos journées vous ne pourrez plus vous débarrasser. Le même que le son lointain des clairons, des timbales et des tambours. Ou le silence vibrant du Christ des Gascons. Ils nous ont tous pris. Je me souviens d'un dimanche des Rameaux où mon frère Nano attrapa un chien parce qu'il voulait qu'on le mette sur l'âne de Jésus au passage où le Seigneur fit son entrée triomphale à Jérusalem.


      ▬Je veux y aller.


      ▬Mon fils, ce ne sont pas les roues arrière. C'est Jésus qui passe en route pour Jérusalem ; envoie lui un bisou


      ▬ Je veux monter sur l'âne. Ben oui, bien oui et oui.


Et les Naneras se sont vautrés dans la boue en enfilant son costume de marin

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